
Le journaliste et cyberactiviste Mohamed Tamalt a été placé en détention préventive, tout de suite après son arrestation à son domicile le 27 juin 2016. Il avait été interdit de quitter le territoire par décision numéro 04 116, son passeport avait été remis au niveau du greffe du tribunal à Alger.
Mohamed Tamalt avait alors entamé une grève de la faim, protestant et dénonçant vigoureusement son incarcération en isolement.
En date du 11 juillet, le journaliste algéro-britannique a été condamné à deux ans de prison et 200 000 Da d’amende pour « outrage à corps constitué » et « atteinte à la personne du président » sur sa page Facebook en vertu des articles 144 bis et 146 du code pénal, a précisé son avocat Me Amine SIDHOUM, soulignant que ces articles prévoient des amendes mais pas de peines de prison.
“La juge a requalifié les faits et introduit l’article 144 qui prévoit une peine de prison“, a ajouté Me Sidhoum en affirmant que cet article du code pénal n’inclut pas les personnes incriminées et citées sur Facebook.
Lors de l’audience d’appel le 9 août, Mohamed TAMALT s’était plaint devant le procureur général du mauvais traitement et des violences qu’on lui infligeait. Le ministère de la justice avait été saisi, et une enquête devait être ouverte sur ces accusations de violences, affirme Hassina Oussedik, directrice d’Amnesty International Algérie.
Grève de la faim, coma et intervention chirurgicale
Après un peu plus de trois mois de grève de la faim, il tombe dans le coma. La direction des prisons et de la rééducation avait alors fourni des détails sur sa détention à la prison d’El Harrach puis à la prison de Koléa à Tipaza en affirmant que le concerné avait entamé une grève de la faim et a été mis sous surveillance médicale. ”Il était ausculté chaque jour par le médecin de l’institution qui mesurait sa tension artérielle et sa glycémie’’ explique la direction des prisons et de la rééducation.
“En vue de le persuader d’arrêter sa grève de la faim, le juge chargé de l’application des peines et le directeur de l’institution lui ont rendu visite. Des médecins et des psychologues sont également intervenus pour le convaincre d’arrêter sa grève sauf qu’il avait insisté malgré les efforts consentis », ajoute la même source.
Souffrant de diabète, l’état de santé de Mohamed Tamalt s’est très vite dégradé. Le 1er Août, il entre en hypoglycémie. « Des médicaments lui ont été prescrits et (…) son cas s’est amélioré. En date du 20/08/2016, il est transféré en urgence à l’hôpital de Koléa où il a subi des analyses biologiques et un scanner, sans laisser apparaître aucun dysfonctionnement assure la direction pénitentiaire.
Toujours selon la même source. “Le journaliste a donc été transféré vers l’hôpital Lamine Debaghine à Bab El Oued où il a été placé en service de réanimation et où il a subi les analyses et les radios qui ont montré qu’il a eu un accident vasculaire cérébral (…) ce qui a nécessité une intervention chirurgical en urgence”, poursuit la même source.
Après l’opération, Mohamed Tamalt a été placé sous respiration artificielle et son état de santé commençait à s’améliorer. “Il a repris conscience et discuté avec l’équipe médicale et commencé à manger normalement”, avance-t-elle. “Sauf que depuis dix jours, l’équipe soignante a découvert des inflammations au niveau des poumons et il a été mis sous traitement ( …)”, explique la direction. Dans la matinée de ce dimanche, son état de santé s’est détérioré avant qu’il ne décède. “Durant sa présence à l’hôpital, sa famille a pu suivre son état de santé et le suivi médical et cela à travers six visites effectuées par son frère et une visite par la mère et deux visites effectuées par un représentant de l’ambassade britannique en Algérie”, affirme la direction qui conclut le communiqué en présentant ses condoléances à la famille.
Une toute autre version…
Pourtant, une source hospitalière nous donne une toute autre version qui contredit les informations officielles. Elle indique que Mohamed Tamalt serait arrivé le premier vendredi du mois de décembre, inconscient, à l’hôpital Lamine DEBAGHINE (ex. MAILLOT).
”Je me rappelle qu’il était accompagné de trois gardiens de prison et de trois policiers de la DGSN, et non du cinquième arrondissement comme habituellement’’
La docteure TOUATI, neurochirurgienne à l’hôpital aurait tout de suite après examen, détecté un hématome extradural de 10 à 12 cm qui nécessitait, selon notre source, une intervention d’urgence.
Les policiers auraient refusé de laisser Mr Tamalt aller ”seul’’ au bloc prétextant que le prisonnier était sous leur responsabilité et qu’ils devaient être présents pour tout acte médical. Afin d’éviter de perdre le malade, la décision aurait été prise de l’opérer dans… une chambre de malade ordinaire au niveau du service neurologie de l’hôpital en présence des services de sécurité.
Le rapport d’autopsie rendu public par le ministère de la Justice, qui a été rejeté par la famille de Mr Tamalt, avait d’ailleurs relevé “la présence de deux cicatrices chirurgicales au niveau du cuir chevelu, medio-frontale et pariétale droite en rapport avec dérivation ventriculaire externe, d’une incision chirurgicale de trachéotomie et d’une incision de drainage basithoracique droite”.
Durant son séjour à l’hôpital Maillot, ajoute notre source hospitalière, Mohamed Tamalt ne pouvait pas recevoir de visite. Ni sa famille ni même son avocat ne pouvaient le rencontrer. Encore moins les représentants diplomatiques britanniques.
Sa mère serait restée une semaine à l’extérieur en attendant une éventuelle autorisation de le voir. En vain…
”Le personnel de l’hôpital était fouillé pour ne pas pénétrer avec des dispositifs d’enregistrements : téléphone, caméscope, dans la chambre ou se trouvait Tamalt …’’ affirme notre source.
”Le Dr LARBANE Farid, qui avait juste allumé la torche de son téléphone pour vérifier la dilatation de la pupille de Tamalt, a été malmené devant moi’’, nous ajoute la même source.
D’autres sources nous informent que les gardiens leur auraient déclaré que Tamalt avait été frappé par des agents alors qu’il était seul dans sa cellule et ce pour lui faire cesser la grève de la faim qu’il avait entamée, ce qui expliquerait les nombreuses traces de coups observées sur son corps…
Pourtant, le rapport de l’autopsie effectué sur le corps du journaliste Mohamed Tamalt, affirme “l’absence de toute trace de violence récente ou ancienne sur l’ensemble du corps”, avait indiqué la Direction générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion sociale.
Mohamed TAMALT serait mort le 10 décembre à 42 ans, une semaine après son admission en service de réanimation. Son décès, selon notre source, n’aurait été annoncé que 24 heures après sa mort…
Selon les informations en notre possession, personne n’a pu à ce jour, avoir accès à son dossier médical complet…
La Direction générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion sociale a souligné « l’absence de tout fondement aux allégations émanant de la défense du concerné et publiées par certains journaux concernant les mauvais traitements et la violence dont le défunt aurait fait l’objet »
Elle a également exprimé « son indignation face aux tentatives d’exploitation tendancieuse du décès de Mohamed Tamalt et se réserve le droit de recourir à la Justice conformément à la loi ». Des menaces à peine voilées…
Il y a quelques jours le président Bouteflika a demandé, selon Ahmed Ouyahia, de ne poursuivre aucun caricaturiste ou journaliste lui portant atteinte… Dommage.
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