
Le 27 Octobre 2022, le Conseil de sécurité a décidé de proroger jusqu’au 31 octobre 2023 le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO). La résolution 2654 (2022) a été adoptée par 13 voix pour et 2 abstentions, celles de la Fédération de Russie et du Kenya.
Auteur : bachir.outaghani@protonmail.com
Kenya et Russie par d’accord !
Le représentant du Kenya a expliqué son abstention par le fait que la résolution adoptée s’écarte, selon lui, du mandat de la MINURSO et le texte adopté ne « reflète pas la volonté du Conseil de sécurité » d’organiser un référendum au Sahara occidental pour permettre l’autodétermination.
Pour ce représentant, l’Envoyé personnel du Secrétaire général devra coopérer de son mieux avec l’Union africaine pour qu’ait lieu le référendum et que le peuple du Sahara occidental puisse exprimer sa volonté.
La Fédération de Russie, qui s’est abstenue comme elle le fait depuis 2018 sur cette question, a quant à elle dénoncé une résolution qui ne reflète que l’opinion du porte-plume (Etats-Unis), et ce, depuis des années.
Pour la Fédération de Russie, les ajustements apportés au texte portent atteinte à une démarche impartiale et non politisée. Le représentant russe a notamment jugé « obsolètes » les références faites dans la résolution au format des « tables rondes » qu’avait organisées en 2018 et 2019 le précédent Envoyé personnel du Secrétaire général, M. Horst Köhler, et qui réunissaient, outre le Maroc et le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie.
La Fédération de Russie prône un règlement du conflit reposant sur des solutions mutuellement acceptables, avec un référendum d’autodétermination du peuple du Sahara occidental.
Une résolution sur l’Autodétermination du Sahara Occidental
La résolution de 2022 souligne qu’il convient de parvenir à une « solution politique réaliste, pragmatique, durable et mutuellement acceptable » à la question du Sahara occidental, qui repose sur le compromis, et qu’il importe « d’adapter l’action stratégique de la MINURSO et d’affecter les ressources des Nations Unies à cette fin ».
Le Conseil, qui « appuie pleinement » les efforts du Secrétaire général et de son Envoyé personnel pour faciliter les négociations afin de parvenir à un règlement de la question du Sahara occidental, en tirant parti des accomplissements de l’ancien Envoyé personnel, engage vivement le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie à collaborer avec l’Envoyé personnel pendant toute la durée du processus, dans un esprit de réalisme et de compromis, en vue de le faire aboutir.
Il demande aux parties de reprendre les négociations sous les auspices du Secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, en tenant compte des efforts consentis depuis 2006 et des faits nouveaux survenus depuis, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies.
La presse marocaine dans tous ses états
Toutefois, la presse Marocaine, qui a éludé l’essentiel de la résolution, a rapporté à l’opinion publique interne une tout autre lecture.
La majorité des titres du Royaume ont focalisé sur le fait que la résolution encourage l’Algérie, au même titre que le Maroc, le Front Polisario et la Mauritanie, à collaborer avec « l’Envoyé personnel pendant toute la durée du processus, dans un esprit de réalisme et de compromis, en vue de le faire aboutir. »
Tous ont interprété cela comme une nouveauté alors, alors que la résolution de 2021, par exemple, disait strictement la même chose !
De même, toute la presse marocaine a, sans surprise, totalement ignoré la partie la plus importante du point 4 de la résolution qui: « demande aux parties de reprendre les négociations sous les auspices du Secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, en tenant compte des efforts consentis depuis 2006 et des faits nouveaux survenus depuis, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et prend note du rôle et des responsabilités dévolus aux parties à cet égard ».
De ce fait, on ne voit pas vraiment où se situerait l’idée que cette résolution identifierait « l’initiative marocaine comme seule solution réaliste au différend du Sahara Occidental » comme le rapporte l’EcoActu !
Une bien étrange façon de couvrir l’événement et tout aussi étrange le choix des mots utilisés.
Une sémantique trompeuse
En effet, lorsqu’ils évoquent le mouvement indépendantiste du Front Polisario, les journalistes marocains parlent d’entité fantoche, alors que le représentant légitime de la République Arabe Sahraoui Démocratique est nommément désigné dans les résolutions de l’ONU, tout comme ceux de l’Union Africaine dont il est membre, comme partie prenante dans le conflit du Sahara Occidental !
Par ailleurs, aucune presse du Royaume Alaouite, que cela soit Hespress ou Medi1News, ni l’agence de presse officielle MAP, ne citent jamais l’autodétermination du peuple du Sahara occidental, reprise 2 fois dans le texte de l’ONU !
La palme de la manipulation de l’information revient toutefois au journal en ligne H24Info, qui affirme, toute honte bue, que le plan d’autonomie, proposé en avril 2007, s’impose de plus en plus comme la solution la plus évidente, « comme en témoigne le vote presque unanime de la résolution 2654 »… Ce qui est bien évidemment totalement faux pour ceux qui auront pris la peine de lire le texte de la résolution.
Même procédé de désinformation de la part du site Média24, qui reprend la sémantique développée par le Makhzen, qui veut transformer un problème de décolonisation clairement identifié par l’ONU et l’UA, comme un simple différend régional…
Ce dernier média va non seulement affirmer que « la résolution ne cite pas le mot référendum », mais tenez-vous bien, que « l’autonomie est l’une des formes de l’autodétermination reconnue par les Nations Unies… ».
Pas certain que l’on puisse trouver plus fort en termes de désinformation !
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