
C’est un nouveau scandale qui ébranle encore une fois la direction générale des impôts. Nous avons mené des investigations dévoilant des pratiques très sombres et douteuses au niveau de la Direction des Grandes Entreprises (DGE), un des services le plus stratégique de la Direction Générale des Impôts en Algérie.
Notre enquête nous a permis d’obtenir des documents exclusifs qui révèlent un large trafic lié à l’effacement illégal de dettes fiscales de plusieurs grandes sociétés étrangères et nationales dont les dossiers fiscaux sont gérés au niveau de la DGE.
Cette pratique porte une fois encore une grave atteinte aux intérêts du Trésor public.
Tout a commencé lorsque des anomalies et irrégularités ont été décelées par certains agents des impôts exerçant au niveau de la recette des impôts de la DGE.
Il faut savoir qu’au niveau de la DGE, il existe une application informatique à travers de laquelle sont gérés tous les dossiers fiscaux.
C’est un fichier centralisé qui est censé retracer la dette fiscale réelle de chaque contribuable ou entreprise établie en Algérie.
Une combine digne d’un film d’espionnage !
Cette application informatique est censée être sécurisée et verrouillée (comme celle des banques à titre d’exemple) afin d’éviter toutes manipulations frauduleuses.
A la demande d’un extrait de rôle du contribuable (document retraçant la situation fiscale du contribuable vis-à-vis de l’administration fiscale), le document censé retracer la situation fiscale réelle du demandeur, est imprimé automatiquement par le service de la recette de la DGE.
Le 28/06/2015 lors de l’impression de certains extraits de rôles, grande fut la surprise de certains agents au niveau de la recette de la DGE de constater que ces états ne reflétaient pas la véritable situation fiscale des contribuables demandeurs de ces documents. Leur dette avait été, tout simplement et illégalement effacée…
Nos investigations nous ont permis de constater effectivement que diverses société présentaient des dettes fiscales importantes selon des documents émis, mais lors de l’impression de leur extrait de rôle, la dette fiscale affichée est nulle, alors que, selon nos sources, ces sociétés n’avaient effectué, entre temps, aucun paiement pour régler leurs dettes…
Cette situation remet en cause la crédibilité et la fiabilité de toutes les données fournies par cette application à savoir le montant des dettes fiscales, les montants du recouvrement national, le montant de la fiscalité ordinaire…etc).
Prenons un exemple concret. La SARL TURKMANI MECANIQUE AND CONSTRUCTION ALGERIE dispose d’un dossier fiscale dont le numéro est : TIN 00066419. Sa dette fiscale réelle à la date du 28/06/2015 est de : 452 690 422,50 DA comme le démontre le document exclusif en notre possession :
Et pourtant, un extrait de rôle portant une dette fiscale de : NEANT (00,00 DA) pour la même société a été établi à la même date du 28/06/2015 comme le démontre cet autre document en notre possession :
Intriguant, étonnant et tout simplement bluffant !
Si l’application informatique de la DGE est sérieusement protégée et verrouillée, comment ce genre de situation peut-elle avoir lieu ?
Il est à noter que des nombreux cas similaires ont été détectés, a-t-on constaté suite à nos investigations.
Cette pratique n’a été possible que suite à une manipulation illégale nous dit-on. A savoir, le forcing informatique ou le “craquage” de l’application informatique utilisée par la DGE, qui impliquerait directement le premier responsable de cette institution à l’époque, à savoir Mr Ghenou Mohamed, puisqu’il serait la seule personne à détenir les codes et les autorisations d’accès nous informe-t-on.
Selon des analyses plus approfondies, il ressort que ce forcing informatique aurait été exécuté en dehors des horaires de travail. Plusieurs sources nous assurent qu’à maintes reprises : ”une présence inhabituelle dans les locaux de DGE de certains agents du service informatique a été constatée durant les Week-ends”
Des cadres intègres qui ont dit non !
Les agents, dans leur haute intégrité et dévouement au service de l’intérêt public et grâce a leur sens de la responsabilité ont décelé et dénoncé ces pratiques illégales et ont, bien évidemment, fait l’objet d’un incroyable harcèlement administratif de la part des responsables de la DGE, notamment le Chef de bureau du personnel Mr Gherbi Ahmed communément appelé Hakim.
Cet harcèlement moral et administratif exercé par ce chef de bureau du personnel s’est accentué au lendemain (29/06/2015) de la découverte de ces pratiques illégales relatives aux extraits de rôles comportant des effacements illégaux de plusieurs dettes fiscales.
Le 29/06/2015, les agents qui ont donné l’alerte pour dénoncer ces pratiques scandaleuses ont reçu des décisions arbitraires de retenues sur salaires comme le démontre un autre document en notre possession :
Le 01 juillet 2015, le chef de bureau, Ahmed Gherbi se serait même permis de s’introduire au niveau de la recette des impôts de la DGE afin de provoquer une dispute avec ces agents réfractaires aux pratiques douteuses décelées.
Des insultes et menaces ont été proférées à l’encontre des agents de l’administration fiscale.
Ne voulant plus subir encore ces humiliations, le 02 juillet 2015, ces agents ont rédigé une requête collective adressée à leur directeur afin de signaler ces agissements inacceptables comme le démontre un autre document exclusif en notre possession :
Suite à une lettre de dénonciation envoyée à tous les organismes et responsables concernés, le ministre des finances de l’époque, Abderrahmane Benkhalfa, a ordonné à l’inspection générale des Finances (l’IGF) de diligenter une enquête sur cette troublante affaire.
Le même ministre avait donné des instructions fermes pour imposer la suspension provisoire de l’établissement des extraits de rôle à travers l’application informatique de la DGE jusqu’à la reception d’un sérieux rapport d’expertise informatique.
L’IGF enquête et confirme
L’enquête de l’IGF a été bel et bien menée au niveau de la DGE durant les mois de juillet et Août 2015.
Le directeur de la DGE aurait tenté, apprend-t-on, de persuader les agents de l’IGF qu’il s’agissait d’un simple bug informatique ! Mais les enquêteurs sont allé jusqu’au bout de leur travail et finissent par confirmer les faits dénoncés.
Les enquêteurs de l’IGF ont même décelé d’autres cas similaires d’effacements en toute illégalité des dettes fiscales.
Elles concernent par exemple la société ECOTEH dont le numéro dossier est 00054720 qui a bénéficié de l’effacement d’une dette fiscale de : 1 747 719,55 DA comme le démontrent les documents exclusifs en notre possession :
Les responsables de la DGI et de la DGE ont de minimiser les conclusions du rapport de l’IGF, ils ont procédé à une expertise informatique comme exigé par le ministère des Finances.
A la surprise générale, cette expertise informatique a été confiée à la direction des opérations informatiques relevant de la Direction Générale des Impôts (DGI). Une conflit d’intérêt flagrant puisque cette expertise a été accomplie par une instance relevant du même organisme incriminé par l’IGF.
Et c’est ainsi que ce scandale aurait été étouffé. L’application informatique de la DGE a été réactivée après quelques mois de suspension sans que les responsables de ces pratiques scandaleuses ne soient jugés, sanctionnés ou entendus par une instance de contrôle.
Des milliards de centimes auraient ainsi été détournés des caisses de l’état avec une facilité déconcertante sans que personne ne s’en émeuve…
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