
Le milliardaire Mohamed-Laïd Benamor est l’une des plus grosses fortunes en Algérie. A la tête du groupe Benamor, l’un des acteurs majeurs de l’industrie agroalimentaire, il incarne également aujourd’hui l’échec retentissant du fameux partenariat public-privé.
Naguère milliardaire chouchouté par les pouvoirs publics et les autorités politiques, aujourd’hui le patron du groupe Benamor est devenu une persona non grata. Preuve en est, le gouvernement a donné instruction de le “chasser” des terrains de la fameuse boulangerie industrielle de Corso, le méga-projet lancé en 2013 qui a abouti à un immense gâchis.
Et pourtant, le 10 février 2013, une résolution du CPE (Conseil participation de l’État) portant le n° 04/132 a consacré “la relance de l’activité du complexe meunier de Corso dans le cadre d’un partenariat avec un privé national”. Cette décision avait permis au groupe Benamor de lancer la Mediterranean Mills Company (MMC), fruit d’un partenariat entre le groupe Benamor et l’entreprise publique l’Eriad d’Alger. En mars 2013, lorsque le pacte des actionnaires a été conclu, le milliardaire Mohamed-Laïd Benamor, et président de la Chambre algérienne de commerce et d’industrie (CACI) depuis septembre 2014, avait vendu aux Algériens le rêve d’un futur grand complexe industriel qui sera fondé sur les ruines d’une vieille entreprise publique.
Et pour ce faire, il était question de consacrer plus de 110 M€ sur cinq ans à la réhabilitation du complexe industriel de Corso pour mettre en placer une boulangerie industrielle de 450 000 baguettes/jour. Une immense ambition qui ne sera jamais concrétisée puisque la nouvelle entité dont 60% des parts sont détenus par le groupe Benamor et 40% par le groupe Eriad, a été paralysée par les conflits et tensions caractérisant les relations entre les deux actionnaires.
Les différends vont prendre une dimension alarmante et les deux actionnaires ne pourront plus continuer à travailler ensemble. A partir de 2013, soit 3 ans à peine après le lancement de ce partenariat, des discussions sont entamées pour conclure un accord de séparation entre les deux parties, à savoir le groupe Benamor et Eriad. Cet accord a été validé officiellement par le CPE en 2017 et la partie Eriad a été autorisée à récupérer tous ses actifs constituant son apport au capital de la société MMC.
Quant au Benamor, il a gardé l’entité juridique MMC. Il a bénéficié également de l’autorisation de délocaliser la boulangerie et à procéder au transfert des équipements et des biens acquis par la société. Pour expliquer cet échec, le milliardaire Mohamed Laïd Benamor a prétexté des difficultés d’ordre administratif, blocages entraînant la non délivrance de l’acte de concession à la société constituée et divergences sur le niveau du plan d’investissement.
Mais Eriad d’Alger n’a pas du tout la même vision.
Selon nos investigations, Ikheneche Djamila directrice du GROUPE AGRODIV, le propriétaire d’Eriad d’Alger, n’a pas hésité à confier à son entourage et à plusieurs membres du gouvernement que l’oligarque Mohamed Laïd Benamor s’est adonné à des pratiques opaques en voulant contraindre l’Eriad d’Alger à valider un plan d’investissement comportant plusieurs opérations douteuses comme celle relative à l’importation d’un matériel de production et de plusieurs équipements à hauteur de 80 millions d’euros. Un montant jugé excessif, exorbitant et injustifié.
Malheureusement, en dépit de toutes ces incompréhensions, le conflit opposant Mohamed Laïd Benamor à l’Eriad d’Alger se poursuit toujours. Selon nos investigations, le président de la CACI disposait d’un délai courant jusqu’au mois de mars dernier pour délocaliser toutes ses activités du site de Corso. Le patron du groupe Benamor n’a pas respecté cette obligation. Pis encore, il a fait usage de la force pour défendre ses intérêts financiers au détriment des intérêts d’une entreprise publique. Mohamed Laïd Benamor a dépêché depuis Guelma, la région qui abrite son plus important site industriel de production des pâtes et des sauces, plusieurs de ses hommes, une sorte de “milice privée”, afin de bloquer les accès du site de Corso au personnel d’Eriad d’Alger.
Les hommes de Benamor ont même commencé à démanteler tout le matériel et équipement de ce site industriel y compris les “portes” des hangars ! Choqué par ce comportement jugé indélicat et inélégant, les responsables de l’Eriad d’Alger ont fini par saisir le gouvernement qui n’a pas hésité à exprimer son courroux.
“Convoqué” par Abdelkader BOUAZGHI, ministre de l’Agriculture, le patron du groupe Benamor tente de calmer le jeu et joue la carte de la diplomatie. Il essaie de convaincre les autorités publiques de lui louer le site de Corso pendant une période de 10 ans prétextant qu’il ne trouve pas un autre site pour y implanter sa boulangerie industrielle.
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